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mercredi 15 août 2018

Méditation : le Baptême des enfants.




Le Baptême des enfants
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Le monde protestant est profondément divisé sur la question du Baptême des enfants. De nombreuses communautés évangéliques rejettent cette pratique, soutenant que le Baptême ne peut être légitimement administré que s'il est demandé par quelqu'un qui a passé par la repentance et la conversion. Dans ces milieux évangéliques, il n'a généralement qu'une valeur symbolique et est conçu comme une profession de foi et un engagement public à suivre le Christ. En d'autres termes, une telle théologie fait du Baptême un acte de l'homme. C'est le croyant qui agit, mais Dieu lui-même n'y fait rien.
Les explications précédentes espèrent avoir montré que ce n'est pas exact, que le Baptême est le lieu où Dieu dans sa miséricorde promet, offre et scelle au croyant le pardon des péchés et la vie éternelle. La Bible enseigne par ailleurs que l'homme est par nature corrompu, pécheur et condamné par la Loi. C'est ce qu'on appelle le péché originel. C'est à partir de ces deux enseignements de l'Ecriture qu'il faut se demander s'il convient ou non de baptiser les enfants. C'est à partir de là aussi que la réponse devient claire et trouve sa légitimité.
L'Eglise luthérienne ne peut pas expliquer ce qui se passe quand un nourrisson reçoit le sacrement, comment Dieu s'y prend pour lui communiquer ses grâces. Elle n'a pas non plus besoin de le faire. Si tout pouvait s'expliquer, il n'y aurait plus de mystères et la foi chrétienne ne serait plus une foi. L'Eglise luthérienne baptise les petits enfants pour les raisons suivantes:


    1) Jésus-Christ a ordonné de baptiser toutes les nations, sans en exclure les nourrissons (Matthieu 28:19).
    2) Des familles entières ont été baptisées par les apôtres (Actes 16:15.33.34; 1 Corinthiens 1:16). Celles-ci étaient composées d'adultes; parfois, quand elles étaient aisées, de serviteurs, et tout naturellement, semble-t-il, d'enfants. Rien ne nous autorise à croire que ces derniers aient été exclus du sacrement. Nous n'avons pas non plus à prouver qu'ils ont été baptisés; il revient plutôt aux adversaires du baptême des enfants de démontrer qu'ils ne l'ont pas été.
    3) Le baptême des enfants découle de la nécessité dans laquelle ils se trouvent, de leur corruption naturelle et de la volonté de Dieu de les faire participer à son salut. Nous n'avons aucune certitude qu'il le fasse, en ce qui le concerne, autrement que par le Baptême, et ce n'est pas la foi des parents qui les préserve du péché originel et les dispense de la régénération.
    4) Nous ne pouvons pas expliquer la foi des enfants. Nous ne pouvons pas non plus expliquer celle des adultes. Il est évident qu'ils ne peuvent pas comprendre l'Evangile ni saisir ses promesses avec leur entendement. Nous ne savons pas non plus comment un homme dans son sommeil ou dans un coma prolongé ou un malade mental peuvent rester unis à leur Sauveur, et nous n'essayons même pas de le faire. La question n'est pas de savoir ce que Dieu peut faire ou non. Il pourrait, bien sûr, s'il le voulait, sauver les petits enfants sans Baptême et donc sans régénération, mais nous n'avons aucune certitude qu'il veuille le faire de cette façon. Nous savons par contre qu'il offre le pardon et la vie éternelle dans le sacrement.
    5) On prétend souvent qu'il faut laisser les enfants grandir pour décider eux-mêmes s'ils veulent appartenir au Christ et à telle ou telle Eglise. Mais le péché est un mal, une maladie dangereuse et mortelle. Or quels sont les parents qui pourraient attendre que leurs enfants soient assez grands pour choisir leur médecin et faire le nécessaire pour guérir? Il est tout à fait évident que l'Eglise n'a pas seulement pour mission de baptiser, mais aussi d'instruire. Elle instruit donc les enfants après les avoir baptisés et leur fait découvrir leur Sauveur, comme elle exhorte aussi les parents à faire leurs devoirs de parents chrétiens. Il est tout à fait clair que le Baptême ne sert à rien si on se détourne du Christ. Ses grâces ne sont reçues que par la foi, et là où il n'y a pas de foi, le sacrement n'a aucune efficacité, même si l'offre de Dieu demeure valide.
    L'enfant qui reste dans l'alliance du Baptême vit continuellement sous la grâce de Dieu. En grandissant, il apprend à réfléchir comme un adulte, entend l'appel de Dieu, découvre le Christ et s'attache à lui par une foi consciente. Ce pas est nécessaire dans la vie du chrétien, mais une telle "conversion" n'empêche pas que cette personne ait vécu avec Dieu et sous sa grâce avant de le faire. Elle n'est au fond qu'une confirmation de son désir de rester sous la grâce de Dieu. Mais il est vrai aussi que beaucoup de baptisés meurent dans l'impénitence et l'incrédulité. La faute n'en incombe certainement pas au Baptême qu'ils ont reçu dans leur petite enfance. Ils ne sont pas pour autant oubliés de Dieu qui, dans sa grâce, les appelle continuellement. Les baptisés déchus de la grâce sont tout aussi perdus que ceux qui n'ont pas été baptisés. L'incrédulité condamne, avec ou sans Baptême. Pourtant, Dieu reste fidèle à son alliance, et lorsqu'un tel homme se repent et revient à lui, il n'a pas besoin d'être rebaptisé. Celui qui se repent retourne à la promesse du Baptême. "La repentance, disait Luther, n'est pas autre chose qu'un retour au Baptême, qu'une reprise de l'oeuvre commencée et abandonnée".
    6) Il existe de nombreux témoignages de l'Eglise ancienne attestant qu'elle baptisait les enfants. Les Pères de l'Eglise qui s'expriment à ce sujet sont unanimes. Il paraît donc évident que le baptême des enfants est une pratique remontant aux origines de l'Eglise.
    7) Nous baptisons les enfants dans l'obéissance à la Parole de Dieu, parce que le Baptême est le moyen choisi par lui pour leur offrir son pardon et la vie éternelle. Qu'en est-il des enfants des parents chrétiens qui meurent avant d'avoir pu recevoir le sacrement? La Bible ne nous oblige pas à affirmer qu'ils sont condamnés. Il n'existe pas non plus de lieu qui leur soit réservé dans l'éternité, comme les soi-disant "limbes des enfants" du dogme catholique. "Ce n'est pas la volonté de votre Père qui est dans les cieux qu'il se perde un seul de ces petits" (Matthieu 18:14). Porter son enfant au Baptême est un acte de confiance en la Parole de Dieu. Inversement, c'est le mépris des sacrements qui est condamnable et non le fait d'en avoir été privé. L'Eglise est appelée à consoler les parents dont les enfants sont morts avant le Baptême, en leur rappelant la miséricorde de Dieu. Mais elle n'est pas pour autant autorisée à différer l'administration du sacrement en encourageant les parents à attendre pour cela que leurs enfants aient atteint l'âge de raison.

La signification du Baptême dans la vie du chrétien

Nous avons vu ce que Dieu fait dans le Baptême, ce qui se passe quand quelqu'un reçoit ce sacrement. Reste à voir ce qu'il signifie dans la vie quotidienne du croyant. Si la résurrection de Jésus-Christ est le oui de Dieu à l'oeuvre qu'il a accomplie sur la croix, le Baptême est le oui qu'il a prononcé une fois pour toutes sur son enfant. Il est l'acte par lequel il lui dit: "Je suis ton Dieu, je t'ai appelé par ton nom, tu es à moi!" Et tout ce qu'il fait par la suite en faveur de son enfant, il le fait au nom de ce oui, de cet engagement pris à son égard. Il faut donc parler du Baptême à la fois dans le passé et dans le présent. Il est une fontaine dont l'eau vive ne tarit jamais et à laquelle l'enfant de Dieu peut boire chaque jour.
Face à sa corruption naturelle et au péché, le croyant, conscient de ses fautes, peut se consoler de la grâce de Dieu qui lui a été offerte en Jésus-Christ, scellée et garantie dans le sacrement. Il sait que le Seigneur ne le rejette pas s'il vient à lui d'un coeur contrit, et qu'il le recouvre de sa justice (Galates 3:27). Se repentir signifie pour lui revenir d'un coeur humble et croyant à l'offre du pardon faite dans le Baptême et en vivre.
Face aux tentations de la chair, du monde et de Satan, le chrétien se souvient qu'en vertu de son Baptême il est enfant de Dieu et que son Père céleste a conclu avec lui une alliance qu'il ne rompra jamais. Certes, il a des ennemis qui lui veulent du mal, le monde, Satan et sa propre chair. Mais il sait aussi que le Seigneur est fidèle à ses engagements et qu'il ne manquera pas de venir à son secours. Il se souvient notamment de cette admirable promesse qu'il a faite aux siens: "Quand les montagnes s'éloigneraient, quand les collines chancelleraient, mon amour ne s'éloignera point de toi et mon alliance de paix ne chancellera point, dit l'Eternel qui a compassion de toi" (Esaïe 54:10).
Dans toutes les détresses et afflictions matérielles, le croyant baptisé se sait assuré de l'amour paternel et de la fidèle providence de celui qui lui a déclaré dans son Baptême qu'il était son Père et entendait le rester à jamais. Le Baptême l'a placé sur le chemin du ciel sur lequel il sait que toute souffrance et épreuve est un moyen pédagogique dont le Seigneur se sert pour l'inciter à l'humilité et au recours constant à l'Evangile, et ainsi le fortifier dans la foi.
A l'approche de la mort, le chrétien qui fonde sa foi sur Jésus, son Rédempteur, peut avoir la consolante certitude que Dieu lui ouvrira le ciel qu'il lui a offert dans le Baptême. Luther écrit dans le Petit Catéchisme: "Le Baptême opère la rémission des péchés, il délivre de la mort et du diable et il donne le salut éternel à tous ceux qui croient". Mourir, c'est livrer un combat, le dernier combat. La mort est le salaire du péché, mais aussi pour le croyant l'amie qui le conduit auprès de son Rédempteur. Les promesses de l'Evangile ont retenti personnellement pour chaque chrétien dans son Baptême et lui ont été scellées à tout jamais. Le sacrement l'a marqué d'un sceau divin indélébile, que seules l'incrédulité ou l'impiété pourraient effacer. A l'heure de sa mort, l'enfant de Dieu peut, confiant, se fonder sur les promesses de son Baptême: son Sauveur ne l'abandonnera pas, mais l'aidera à franchir le dernier pas.

En attendant ce moment béni, le croyant trouve dans son Baptême la force de servir son Dieu, de marcher dans l'obéissance, de vivre dans la sainteté et la justice. Il est un bain de la régénération (Tite 3:5) par lequel le Saint-Esprit opère une vie nouvelle. La Bible enseigne que le chrétien est baptisé dans la mort du Christ et enseveli avec lui, pour ressusciter avec lui pour une vie nouvelle. Le Baptême est ainsi source de sanctification. Se souvenant des grâces reçues, le chrétien se doit de servir son Dieu et de le glorifier par une vie sainte. Dans les promesses faites et scellées par l'eau du Baptême, il trouve la force de faire ce que son Dieu lui demande de faire. Le sacrement est ainsi moyen de sanctification au même titre que la prédication de la Parole de Dieu.  

(Wilbert Kreiss, Docteur en Théologie luthérienne, La Petite Dogmatique, edition collection Kreiss. 2013).